vendredi 7 mai 2010

XXXII LA PENDAISON. Brûle-maison était il un espion contre la france ? L'histoire d'une dangeureuse visite à Tourcoing avec 4 mousquetaires .


BRULE-MAISON
Se fait arrêter comme espion,
Passe par Tourcoing, et l’on fait accroire aux Tourquennois qu’il sera pendu le lendemain sur la place de Tournai
AIR: De Joconde, noté n°4.
Au 3.me Recueil.

Venez entendre une chanson,
Remplie de complesanche,
Des Tourquennois et brûl-Maison
Et d’un parti de Franche ;
Arrête-là, m’ont dit d’abord,
Le fusil en balance,
Di nous a tu un passe-port
De queuque Ville de France ?


Aussi-tôt j’arrête mes pas,
J’ai dit rempli de buse,
Ma foi, Messieurs, je n’en ai pas ;
Voulant, faire mes excuses,
Je suis un vendeur de canchon,
Par les bourgs et les villages :
Pour avoir un passe-port ben bon,
J’ai trop peu de gagnage.


Le sou-partisan grand garchon,
Me dit d’humeur gentille,
N’aiche-point ti Brûle-Majon
Que te cante den Lille ?
Si-tôt je li déclare le vrai,
Oui-dà ché mi-même :
Il faut venir deden Tournai ;
Lors je venois tout blême.


Un autre dit à haute voix :
Va, va, n’eut point de crainte,
Chez pour vir si les Tourquennois
De ti feront des plaintes :
S’il est vrai qu’il te haïtent tant,
J’en veux vire l’expérience ;
Fait semblant, dit le partisan,
D’être en pan en dolence.


Si-tôt m’ont mené sur che point,
D’Halluin par le village,
Passer à travers de Tourcoing ;
Arrivant au bourgage,
Si-tôt ont crié tout de bon,
Avanche, avanche, avanche,
Venez tertous vir Brûl’-Majon,
Pris d’un parti de franche.


Che parti par den Tourcoing
A ben resté heures,
Pour demander, n’en doutez point,
A rafraichir leu cœur ;
Veant que j’étois ben gardé,
Par quatre Mousquetaires ;
Après m’avoir tous ravisé,
Va-t’y mal à z’affaires ?


Le partisan dit sans fachon,
Si vous volé l’apprendre,
Nous l’avons pris pour espion,
Et nous le ferons pendre :
Il a fé des canchons, pour de vrai,
Dessus nous à la guerre ;
Venez demain deden Tournai,
Y f’ra un saut en l’aire.


Les Tourquennois si-tôt ont dit,
D’une maine arrogante,
Il en a fé sur nous aussi
Pour le moins ben quarante :
Chest eun’douche mort d’être pendu,
Y mérit’davantage ;
Y doit êtr’ brùlé u rompu,
Seul’ment pour no Bourgage.


Si manque cem’crox pour être rompu,
L’un dit j’donnerai eune herche,
Nous li intasserons un dent d’ven l’cul
Pour taper j’donnerai l’perche ;
L’aut’ dit je barai un licot ;
Mi l’gibet, dit gros Jacques,
Et mi pour l’brûlé, les fagots,
Quand j’devrot vende m’vaque.


Les soudars et le partisan
Ont quemenché à rire ;
En digeant vous êtes ben méchant,
F’rez-vous cha comm’ à l’dire :
Me awis, répondit Michaut,
Dit en venant tout blême,
Car si ni avoit point de bouriau,
Je l’pendrois ben mi-même.


De plagi que j’étois tenu,
Pour finir me carrière,
Ils ont fait mettre sur le cu,
Ben trois rondell’ de bierre.
De temps en temps on me donnoit,
Pour arrosé mes lèvres,
Digeant pour le dernière fois,
Bois-en tant que ten crève.


Je leu ai dit par soumission,
Mais d’un’ humble parole :
Messieurs, je vous demand’pardon
De toutes les frivoles
Que j’ai fait en ma vie sur vous ;
Je vois qu’il faut me rendre ;
Ont dit : nous te pardonnons tous,
Puisque l’on va te pendre.


Le partisan m’a fait loyé,
Tout comme un criminel,
Jusqu’à temps que j’arois quitté
Mes ennemis mortels :
Dit aux Tourquennois d’un cœur gai :
Venez demain en bende,
Deden le marqué de Tournai,
Et vous le verrez pende.


Nous n’avons warde d’y manqué,
Pour vir’ che biau che-d’œuvre ;
Che parti en m’ayant mené
De Leers à Templeuve,
Anssi-tôt m’ont dit, Brûle-Majon :
Pour mériter ta grace,
Y faut qu’te nous fache eune canchon
De toutes leux grimaces ;


Je me suis mis à composer,
Et un autre à écrire,
Et en deux heures de temps j’ai fet
Chelle canchon pour rire :
Ayant ben ri de che sujet,
M’ont laché à la brune,
Sachant bien qui n’auroient point fet
Aveuc mi leur fortune.


Le lendemain, les Tourquennois
Sont venus, je vous jure,
Pour avertir tous les lillois
Que ma mort étoit sûre :
Arrivant y m’ont vu canté
Au mitant de la place ;
Ils ont dit (non sans se fâché) :
Ce diale a fet ses farces.

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